Il s’agit du montage audiovisuel réalisé en 1971 et utilisé en premier lieu pour la campagne des municipales. C’est une réussite militante, esthétique, politique. Il s’agit d’une projection en « fondu-enchaîné par deux appareils» de nombreuses diapositives, projection rythmée par l’audition simultanée de chansons, d’interviews d’habitants et de reportages des journalistes de Europe 1 faits sur le vif en mai 68. Ce montage a été fort apprécié lors de ses projections qui ont continué après la campagne.

Claude Daugé avait fait un stage sur l’audiovisuel à l’ENS de Saint-Cloud. Il propose à la section du vingtième de réaliser un tel montage et constate avec joie que l’idée séduit quelques camarades. Et c’est parti ! De longues et nombreuses réunions de travail se tiennent chez moi avec Claude, Jean Biscarros, Laurent Zundel et peut-être quelques autres épisodiquement. Nous décidons de réaliser des interviews d’habitant/es dans les rues et parfois chez eux. Jean me rappelle combien il fut surpris de voir autant de passants accepter volontiers de répondre ; il est vrai que nous n’avions pas de caméras. Surpris également de constater combien leurs réponses étaient souvent claires, directes, percutantes sur des problèmes politiques importants comme la « déportation » en banlieue des plus défavorisés. C’est sans doute ce thème développé dans nos listes « Paris aux travailleurs » qui a fait le succès de celle-ci avec plus de 9% et a stupéfait le PCF. Les interviewés ne parlaient de leurs soucis personnels, quotidiens que pour les lier à une vision collective. Belle démonstration de lucidité et de sens du bien commun !

Nos interviews étaient loin d’être parfaites car nous n’avions pas un matériel de professionnels et des bruits annexes étaient perturbateurs. Le travail de lecture, de bonification technique, de choix des séquences à sélectionner a été long, un peu fastidieux. Plus joyeux le choix des chansons à enregistrer ! J’avais acheté un gros magnétophone Revox et le couple Schalchli avait décidé d’adhérer à condition que leurs cotisations servent à acheter une table de mixage. Nous n’étions pas des pros. Laurent Zundel et Jean Biscarros ont été les artisans majeurs de la réalisation des mixages ; Nous avions même prévu que le déclenchement des projections de diapositives serait commandé par la bande du magnétophone au moment adéquat. Mais cela n’a pas fonctionné en pratique et j’ai appris avec plaisir le rythme nécessaire à la concordance entre le son et l’image, dans le passage d’un projecteur à l’autre. Les spectateurs étaient admiratifs.

Sur les affiches en sérigraphie qui annonçaient la projection, le montage était baptisé « Des pierres, des hommes, des luttes ». Le montage s’ouvrait avec la chanson « Sous les toits de Paris » et de belles photos de notre arrondissement. Une séquence importante portait sur le logement et les promoteurs avec projection de nos affiches ci- jointes « nous étions ravis d’avoir trouvé pour accompagner cette projection la chanson « Les loups sont entrés dans Paris » chantée par Serge Reggiani. Une partie importante était consacrée aux transports illustrée par nos affiches en sérigraphie de la section PSU 20e et « Le poinçonneur des Lilas » chanté par Serge Gainsbourg

Toute une séquence sur le contrôle ouvrier, une autre sur les foyers de travailleurs immigrés. La suite sur mai 68 était déjà un peu décalée mais les images de manifestations de mai 68, la belle affiche du CRS au brin de muguet et « Il ne s’est rien passé» rappelaient de bons souvenirs à plusieurs.