Mai 68 raconté à ses enfants, premier épisode
:: Par Guy Philippon, mardi 26 décembre 2006 ::
L'histoire politique de mai 68 reste à écrire car les livres écrits à chaud manquent de recul et les livres "grand public" comme Génération de Hamon et Rotman sont une offense à l'histoire. Leur partialité en faveur des trotskistes et des maoistes les conduit à escamoter l'essentiel: le choc de 3 blocs politiques et les véritables rapports de forces
''L’arbre Vert s’il n’avait pas de racines profondes dans le passé aurait du mal à résister aux
tempêtes''
Imaginez un pays privé d’essence presque totalement pendant plusieurs semaines (le retour de l’essence jouera un rôle décisif dans le retour à l’ordre !). Il était aussi privé de transports publics, métros et bus !!
Imaginez des cohortes de piétons pressés de se rendre aux assemblées générales de leur usine, de leur lycée, de leur fac, de leur bureau ou à une manif du quartier latin pour y scander sur des rythmes nouveaux ces slogans décapants dont plusieurs sont restés célèbres. La droite ne retient que ceux susceptibles de décrédibiliser le mouvement
Imaginez la grève générale, entre 6 et 10 millions de grévistes (un certain nombre par manque de transports ou profitant de l’occasion pour prendre des vacances)
Imaginez lles grappes humaines discutant passionnément un peu partout dans le centre de Paris, dans les rues rendues aux piétons, aux carrefours, dans les salles de la Sorbonne, du théâtre de l’Odéon, dans bien d’autres lieux Discussions enflammées mélangeant délires et analyses rationnelles, bréviaires marxistes et imaginations libertaires. Mais toutes et tous exprimaient la joie de retrouver une parole libre, une possibilité de communiquer avec l’autre ; la joie d’échapper à l’étouffoir politique, idéologue, moralisateur du gaullisme finissant. Le piège de la société de consommation était clairement dénoncé et les ébauches de l’écologie politique s’opposaient au conservatisme politique des communistes.
Imaginez les salles de classes de lycées occupées toute la journée par des commissions réunissant pour la première fois élèves, professeurs, agents d’entretien, secrétaires de l’administration. Nous y construisions l’école nouvelle en rupture avec le modèle hérité de Napoléon. D’ailleurs Edgar Faure, ministre de l’Education Nationale de l’après 68 a eu l’intelligence de récupérer une partie de ces idées, création de la fac profondément originale de Vincennes, par exemple
Prochain épisode : les 3 blocs politiques, les 3 chocs
Troisième épisode : l’imagination au pouvoir, arts, affiches, rôle des trasistors
Quatrième épisode : les hommes de l’ombre, les hommes de la lumière (désolé : peu de femmes !) Michel Rocard, Mendès France, Heurgon, Edmond Maire, Daniel Cohn Bendit etc.