HISTOIRES DE CONSEILS DE QUARTIER
:: Par Guy Philippon, mardi 13 février 2007 ::
Historique et bilan des conseils de quartier du 20e arrondissement de Paris entre 1991 et 2001. J'étais alors délégué du maire pour le quartier Plaine situé au sud de l'arrondissement entre la rue d'Avron et le Cours de Vincennes, frontière avec le 12e. J'étais alors membre de l'Alternative Rouge et Verts, AREV qui avait constitué la liste autonome avec les Verts et la CAP
Fin 1995, naissaient dans le 20éme les premiers Conseils de Quartier pour Paris ; ils étaient dans le programme de notre liste municipale (Verts et proches) autonome au premier tour ; ils furent vite créés ensuite dans le 19éme, mais seulement en 1999 dans le 10éme, et pas dans les 3 autres arrondissements à majorité plurielle. Un mot du débat entre les élus du 20éme : l’idée des « tirés au sort » vient d’Assouline qui les voyait « porter la parole brute, authentique, des habitants » ; le PC voulait plus de 50% de conseillers désignés par les politiques qui, seuls ont l’onction du suffrage universel ; nous voulions la parité, une représentation des « immigrés » et beaucoup d’associatifs ; c’est nous qui avons obtenu du maire le système des 3 tiers (politiques, associatifs, tirés au sort). Nous avons arraché en 2001 ce que Charzat nous avait refusé en 1995 : la parité et une participation des immigrés non communautaires
Le découpage géographique en 7 quartiers était très contestable pour 2 d’entre eux : le quartier Gambetta était immense, le double au moins des autres en surface et en population ; en décembre 97 il fut coupé en 2 : « Gambetta » et « Pelleport-Télégraphe-Saint Fargeau » sans qu’il y ait une véritable logique de découpage et le nom du second montre assez qu’il n’a pas de véritable unité ; le quartier « périphérique » était en fait une aberration puisqu’il allait de la Porte des Lilas au Cours de Vincennes, coincé entre le périphérique et les boulevards des Maréchaux ; son intitulé renforçait le sentiment d’exclusion des habitants coupés du « vrai » Paris. Il a été supprimé en 2000 et chacun des 4 « sous-quartiers » a été alors rattaché au quartier adjacent. Il reste donc 7 quartiers.
Les moyens matériels dont disposaient les Conseils étaient très faibles puisque leur création rencontrait l’hostilité de la majorité parisienne d’alors (c’est Paris qui finance tout) et n’était pas du tout la priorité ailleurs que dans le 20éme et le 19éme. La mairie faisait imprimer et diffuser dans les boites à lettres 4000 ou 5000 invitations pour chaque séance plénière de chaque Conseil, s’occupait de retenir les salles, d’y faire parvenir tables et chaises, de l’enregistrement des débats et de la diffusion des comptes-rendus aux 39 conseiller(e)s et aussi aux « invités permanents » qui s’étaient inscrits sur un cahier ou avaient téléphoné au bureau des Conseils à la mairie (la secrétaire du maire adjoint Assouline a assuré tous les travaux matériels de frappe, d’envoi, d’organisation à plein temps ; pour 7 quartiers c’est un énorme travail !). Avec le changement de majorité parisienne, les Conseils ont un petit budget propre pour leur fonctionnement autonome.
La Charte de 95 instituait dans chacun des 7 quartiers un « délégué du maire pour le quartier donné » qui présidait les séances conjointement avec le maire, parfois seul, organisait librement les réunions de commissions, les activités concrètes. Il siégeait au Bureau municipal, était choisi uniquement parmi les conseillers d’arrondissement et était responsable devant l’équipe. Le PS avait choisi les 5 délégués dans les 5 quartiers les plus riches en associations, les plus à gauche aussi globalement ; il avait octroyé le quartier Périphérique au PC et à notre liste le quartier Plaine. La motivation du Délégué, ses disponibilités au point de vue du temps, ses conceptions de la démocratie, sa volonté d’autonomie pour certains, ont conduit à de vraies différences entre les 7 bilans des 7 quartiers, en particulier quant aux commissions de travail, à la régularité de leurs réunions, aux modes de fixation des ordres (du jour, des commissions et des plénières), au suivi et à l’avancée des dossiers. On peut dire que la seule commission qui ait fonctionné efficacement partout est celle qui s’occupait des activités festives, des braderies, repas de quartier ; toutes ces actions ont été réussies, ont créé du lien social, du dynamisme et il faudra absolument les continuer, les amplifier ; elles mobilisent de nouveaux militants.
Trois énormes rapports de l’Observatoire de la Démocratie créé en 96 analysent de façon très complète et intéressante les différents aspects de la Démocratie Locale dans le 20éme, à partir d’enquêtes sous formes d’interviews des conseiller(e)s mais aussi du public menées pendant des mois par des chercheurs et des étudiants très motivés, avec questionnaires, statistiques, etc. dans chacun des 7 quartiers ; Cet observatoire était constitué de chercheurs indépendants et parfois très connus. Ils indiquent que les présences dans les séances des conseils ont oscillé entre 50 et 150 avec une forte fréquence de 100, y compris et peut-être surtout en fin de mandature. L’influence du Délégué du maire sur la préparation des réunions, la discussion en séance, les avis et vœux émis en conseil a été jugée forte ou très forte par les sondés avec des chiffres variant entre 65 et 68% ; ce délégué a été perçu comme porte-parole du quartier par 59% contre 27% qui voyaient en lui le représentant de la mairie dans le quartier (cela a pu peser dans les choix du maire Charzat en 2001 pour la présidence des conseils).
Les thèmes de discussion préférés ont été : environnement-cadre de vie pour 69%, sécurité pour 61%, urbanisme pour 56%, voirie-propreté pour 51%, fêtes pour 45%, logement pour 38%, jeunesse et sports pour 27%, crèches-scolarité pour 26% (on pouvait donner plusieurs réponses) Il souligne aussi que progressivement les spectateurs-spectatrices des conseils non conseiller(e)s ( les conseillers de quartier sont assis autour de la table en U solennelle, avec le maire et les élus) ont imposé leur prise de parole, soit au début, soit sur chaque sujet, après les interventions des conseiller(e)s, soit en fin de séance ; Les situations sont très variables. Pour les votes, des vœux en particulier, seuls les conseiller(e)s votent.